La CGT Pôle emploi Centre val de Loire, réunie en commission exécutive, a retenu 3 témoignages parmi tant autres qui décrivent « la vraie » vie actuelle des agents de Pôle emploi. Dans ces 3 écrits sont abordés les politiques de l’établissement, l’organisation et la charge de travail, le management, les conditions de travail, les relations internes, l’interaction avec nos usagers
Les membres directeurs de la CGT Pôle emploi Centre val de Loire réunis en commission exécutive le 09 février 2021
LETTRE OUVERTE
A Monsieur le Directeur Général
Monsieur le Directeur Général,
La CGT Pôle emploi Centre val de Loire, réunie en commission exécutive, a retenu 3 témoignages parmi tant autres qui décrivent « la vraie » vie actuelle des agents de Pôle emploi. Dans ces 3 écrits sont abordés les politiques de l’établissement, l’organisation et la charge de travail, le management, les conditions de travail, les relations internes, l’interaction avec nos usagers.
La CGT crie : « AU LOUP ! », alors qu’il n’y a pas de quoi fouetter un chat ? Vous auriez tort de considérer notre alerte à la légère. Les militants et les élus du personnel CGT sont témoins et acteurs de ce quotidien depuis si longtemps qu’ils ne peuvent pas rester davantage dans un silence qui les rendrait complices des dérives constatées, ce n’est pas le genre de la maison.
Ce qui nous alerte particulièrement et que nous vous proposons de partager malgré les antinomies réelles qui nous différencient, est motivé par la multiplicité de témoignages comparables qui nous parviennent, et plus encore par la nature inquiétante, noire, parfois mortifère de leur propos.
Afin d’illustrer la situation nous avons retenu 3 courriers représentatifs. Nous sommes persuadés que vous prendrez la peine d’en prendre connaissance, ils vous aideront à appréhender la détresse inédite dans laquelle se trouvent vos équipes.
Voici une extraction non-exhaustive à laquelle nous nous sommes livrés pour tenter de mesurer l’intensité de l’immense mal-être qui submerge chaque jour davantage les personnels de Pôle emploi :
- Je vois le mal-être de mes collègues…. direction… aveugle et insensible.
- Mon métier se dégrade.
- Les choses se gâtent… c’est tout une angoisse.
- J’ai ce sentiment d’humiliation.
- Plus ça va, moins notre travail a de valeur.
- Suis-je là uniquement pour cliquer ?
- Je suis à l’écoute de mes collègues qui ne vont pas bien.
- On travaille seul, nous ne sommes plus un collectif.
- L’isolement professionnel est dur à gérer, c’est aussi physiquement épuisant.
- Sans parler du fait que nous sommes fliqués. Je ne suis pas là pour faire du batonnage.
- C’est dur de laisser le demandeur repartir en ne l’ayant qu’écouté.
- On nous vend la qualité de vie au travail mais tout cela n’est que mensonge.
- Tout cela est pesant sur les conseillers… finissent par craquer.
- Les arrêts maladies se multiplient, le burnout et… toutes les maladies en lien avec le stress
- Moi qui me pensais résistante au stress, je vous écris ces maux, c’est que j’arrive à un stade critique.
- Ceux que l’on pensait résistant jusque-là ne le sont plus.
- Le chantage au recrutement, si tu veux un CDI…
- Enfin j’ose avouer que je ne vais pas bien dans mon travail.
- Je ne veux pas aller travailler avec la boule au ventre, je ne veux pas que mes collègues continuent de craquer les uns après les autres.
- Je ne voudrais pas que le parallèle Pôle emploi / France Télécom soit fait.
- Il y en a marre de ces managers et de cette direction qui gèrent par la terreur.
- J’ai dégradé ma santé sans en être conscient.
- J’ai trainé ma peine espérant des jours meilleurs… « Enfoncé dans une dépression ».
- Mais cela ne cessera donc jamais ?
- Je ressens un mal-être au travail…j’ai le sentiment de travailler sous surveillance.
- J’ai perdu le sourire et cela me désole.
- J’ai toujours aimé le poste d’accueil… SARC fermé j’appréhende… L’indemnisation, la connaissance du socle commun ne suffit pas… « fiche escalade » et je me prends le désarroi des gens… le sentiment d’être inutile, disqualifiée, maltraitante…ça ne peut plus durer !
- On nous pond des plans d’action à appliquer dans un délai très court sans qu’on sache pourquoi ni dans quels buts.
- Plus le temps de faire le « vrai » travail… épuisement, sentiment d’absurdité, de gâchis.
- Le numérique ajoute de la vitesse et de la rigidité.
- Le télétravail, isolement, dislocation du collectif qui nous faisait tenir et problème de communication.
- Je ne sais pas combien de temps encore je vais tenir… m’éteindre, de passer en pilote automatique, de faire sans réfléchir… quelle tristesse, quel gâchis…
On a de quoi s’inquiéter ! D’ailleurs nous pensons que vous êtes inquiet vous aussi : monsieur le Directeur Général Adjoint des Ressources Humaines nous propose de participer à un stage en ligne afin de nous aider à gérer nos angoisses, à grand renfort d’éminents intervenants : ex-sportifs reconvertis dans la communication qui monnayent tous les secrets de leur phénoménale force mentale, clé du succès de leurs exploits.
Nous vous remercions pour la sollicitude dont vous faite preuve. Vous comprendrez à la lecture des paroles d’agents que nous vous soumettons que l’heure n’est plus à ce genre de « solutions ». Les dégâts constatés à ce jour ne peuvent être réduits à des propositions de type numéro d’appel psy ou séance de sophrologie.
Monsieur le Directeur Général, c’est aux causes de ces souffrances qu’il est inexorablement nécessaire de s’attaquer, et c’est un chantier colossal ! Pour y parvenir il faut comprendre pourquoi et comment la culture de Pôle emploi se nourrit si fréquemment sur la peur, l’angoisse, le déclassement de ses agents. Ces caractéristiques totalitaires présentent toujours en surface une image lisse de notre institution, alors qu’en réalité notre organisation très militarisée broie les êtres dès lors que ceux-ci présentent consciemment ou non la moindre aspérité.
La souffrance au travail n’est pas une option acceptable !
Pôle emploi n’est pas n’importe quelle institution, son histoire a démontré la place particulière qu’elle représente aux yeux de nos concitoyens pour qui elle est un lien indispensable entre deux activités. Elle aide à faire le deuil du précèdent travail et à se projeter dans le suivant. En même temps Pôle emploi permet à ceux qui sont privés d’emploi de subvenir à leurs besoins pour eux et leurs familles. C’est socialement énorme !
Les collègues encaissent frontalement ces réalités humaines et le font avec passion, ils chérissent leur travail, d’ailleurs ils l’écrivent. Les situations sociales qu’ils rencontrent vont de la simple démarche administrative aux drames humains les plus durs. Ils font face, avec responsabilité et même avec dévouement. Mais ils n’en peuvent plus d’exercer leurs difficiles métiers dans des rapports hiérarchiques infantilisants.
Réputés qualifiés à remplir leurs missions de service public, ils ont toujours fait la démonstration de leur efficacité. Ils méritent enfin d’être pleinement reconnus. La réponse à apporter ne peut se limiter aux trop nombreux slogans de communication interne qui sonnent creux et qui par ailleurs reçoivent un crédit très limité, nous nous abstiendrons ici d’en faire la liste…
Monsieur le Directeur Général, notre propos n’est pas par ces mots d’alimenter une quelconque polémique, mais bien de vous alerter sur l’état physique et moral extrêmement tendu des agents de Pôle emploi. La pandémie subie depuis mars 2020 dans nos vies personnelle et professionnelle aggrave significativement une ambiance générale déjà antérieurement explosive. La crise remonte bien avant l’épisode COVID 19.
Nous ne listons pas ici nos revendications, comme nous en avons l’habitude. En revanche, nous formons le vœu que notre alerte soit reçue par vous-même par les pouvoirs publics et par les premiers intéressés, agents de Pôle emploi ainsi que tous citoyens, usagers ou non du service public de l’emploi.
C’est pourquoi nous décrétons ce courrier LETTRE OUVERTE.
Comptant sur la mobilisation de votre énergie à résoudre en profondeur la condition désormais douloureuse des agents de Pôle emploi dont vous avez la responsabilité, recevez Monsieur le Directeur Général l’expression de nos salutations respectueuses et militantes.
La Commission Exécutive CGT Pôle emploi Centre val de Loire
Témoignages : 2 femmes & 1 homme
1 trentenaire, 1quadra, 1 quinqua
1 GDD, 1 CDDE, 1 CDE